TROY VON BALTHAZAR - How To Live On Nothing
Non mais sans rire, il devient énervant celui là. L'air de rien, comme ça, de façon presque désabusée, monsieur le chanteur dépressif hawaïen habitant toujours un peu partout et nulle part nous a pondu sans doute l'un des meilleurs disques de 2010, à la cool. Oui, le leader de Chokebore pose sur How To Live On Nothing les morceaux de son imagination tordue, dont certains trainaient depuis quelques temps déjà, de la plus belle des manières. Comparer ce disque à un truc pop quelconque relèverait de l'ignominie.
Pourtant ce disque aurait pu donner prétexte à la moquerie. On pourrait y coller une pochette à base de petits poneys chatoyants chevauchant fièrement un arc-en-ciel prenant naissance dans une fontaine de pétales de roses. Sauf qu'ici le poney est dépressif, l'arc-en-ciel a la gueule en vrac et la fontaine crache de la bière moite. C'est là sans doute tout l'intérêt de cet album, et de la musique de ce gars en général, mixer aux bribes d'une pop touchante une mélancolie profonde. Une recette identique finalement à celle de son ancien groupe mais dans une forme toute différente. Guitares, basse, toy piano, ukulélés, batterie, loop station et autres saloperies, tout y passe. Si le format guitare/voix prend naturellement le dessus sur la plupart des morceaux, il n'est pas un passage qui ne soit au final travaillé, bidouillé, brouillé par un truc inattendu. Des voix croisées en arrière plan, une note de piano, des voix féminines, une touche de mélodica, un beat tout cheap, tout est bon pour transformer ces ritournelles pour lover adolescent en petits bijoux de mélodie. Et la recette fonctionne, depuis la chanson folk lo-fi à deux accords qui paraît être enregistrée sur un magnéto K7 au morceau d'indie rock pur et dur où se superposent les couches d'instruments. On y parle de filles, d'amour gâché, de pénis, de loose, de solitude. Là encore on se dit parfois que le personnage va trop loin, s'enfonçant dans son propre cliché de bonhomme perdu à l'ego surdimensionné. Et pourtant non, il y a presque du second degré dans tout cela et l'ensemble ne flanche jamais. On regrettera juste un ou deux passages vraiment trop guimauve, mais vite rattrapés par l'ensemble et par une voix aussi singulière qu'émouvante.
La classe quoi.
Troy - Communicate (pour le côté guimauve)